Rebecca Hall, actrice ayant déjà de multiples bons films à son actif (Le Prestige, The Town, La Proie d’une Ombre…) se lance dans la réalisation avec un premier long métrage, Clair-Obscur (Passing en VO). Destiné à sortir sur Netflix le 10 novembre, c’est présenté par la réalisatrice elle-même durant le Festival Lumière que j’ai pu découvrir le film tel qu’il avait été imaginé à l’origine : sur grand écran.
« L’histoire de deux femmes noires, Irene Redfield et Clare Kendry, toutes deux suffisamment claires de peau pour se faire passer pour des femmes blanches, mais qui ont décidé de vivre leur appartenance ethnique de manières radicalement opposées au plus fort de la Renaissance de Harlem, dans le New York de la fin des années 20. »
Adapté du livre du même nom de Nella Larsen de 1929, Clair-Obscur m’a tout simplement fait découvrir quelque chose que j’ignorais, que des femmes noires se maquillent et se déguisent en blanches pour s’intégrer, pour « réussir ». Un autre point m’a frappé, c’est la qualité de l’écriture. En effet les dialogues sont fins, intelligents, prétextes à de la subtilité et énormément de non-dits. Aussi, cette politesse générale fait plaisir aux oreilles.
Sans fioritures ni trop de longueurs inutiles (quasi aucune), le film installe ses personnages, les développe sur plusieurs années (ce point précis manque de clarté) nous montrant leur évolution rapide pour certains, lente pour d’autres, comme un poison. Comme son titre et son affiche le suggèrent, personne ici n’est blanc ou noir, chacun ayant sa part de mystère qu’il vaut mieux la plupart du temps garder secret.
Chose rare, Rebecca Hall a choisi de raconter son récit en utilisant une photographie monochrome singulière. Elle a également choisi un format que l’on a perdu l’habitude de voir au cinéma, le 4/3. Ces choix, couplés à de beaux décors et des costumes réussis (malgré un budget que l’on imagine aisément très serré) nous permettent de nous immerger dans les années 20 sans difficultés. Mais ce n’est pas tout, il y a là un talent indéniable pour la mise en scène, certains plans sont même magnifiques.
Côté casting, la touchante Tessa Thompson (Westworld, Thor Ragnarok, Sorry to Bother You, Creed, Selma) crève l’écran, quand elle ne se fait pas voler la vedette par la lumineuse Ruth Negga (Loving, Ad Astra, Warcraft). Les seconds rôles ne sont pas en reste et subliment l’ensemble, notamment Andre Holland (The Knick) que j’aimerai voir plus souvent, Bill Camp (The Night Of, Dark Waters, Joker) ou Alexander Skarsgård (Melancholia, Tarzan, Godzilla vs Kong, Generation Kill).
La bande originale est également très jolie, mélangeant du blues, jazz et des compositions plus minimalistes et intimes au piano par Devonte Hynes.
Au final, Clair Obscur et un très bon premier film et Rebecca Hall une réalisatrice que je suivrai avec grand plaisir désormais. Le film ne trouvera surement pas son public sur Netflix, mais cela aura au moins le mérite de peut-être le faire découvrir plus facilement que s’il était sorti dans de petites salles, ce qui aurait été le cas ne nous le cachons pas.
CaptainSmoke lui attribue la note de
En bref
Premier long métrage réussi pour Rebecca Hall. Clair-Obscur nous raconte avec élégance une histoire qui ne l’est pas du tout.