On connait Yvan Attal d’abord pour sa longue carrière d’acteur (qui continue), mais moins pour sa carrière de réalisateur. Cette année il revient avec un nouveau long métrage, Les Choses Humaines (adapté du roman du même nom de Karine Tuil). J’ai eu le plaisir de le découvrir lors du Festival Lumière, présenté par Yvan Attal lui-même et son actrice principale Suzanne Jouannet, et chose rare et très appréciable, pour en discuter ensuite une fois le film vu (pendant une bonne quarantaine de minutes !).
« Un jeune homme est accusé d’avoir violé une jeune femme. Qui est ce jeune homme et qui est cette jeune femme ? Est-il coupable ou est-il innocent ? Est-elle victime ou uniquement dans un désir de vengeance, comme l’affirme l’accusé ? Les deux jeunes protagonistes et leurs proches vont voir leur vie, leurs convictions et leurs certitudes voler en éclat mais… N’y a-t-il qu’une seule vérité ? »
Vaste et terrible sujet que celui du viol. Car si l’on ne peut que condamner, il faut reconnaître que la défense de l’accusé est également un droit fondamental et qu’elle peut, si elle est bien amenée semer le doute. Et le doute est un poison pour l’esprit. Parce qu’il faut tout de suite jouer cartes sur table, le film ne choisit pas un camp plutôt que l’autre même si le procès vient à son terme et que la justice rend son verdict. Ici on nous présente le cheminement de l’accusé comme celui de la victime, avec tout ce que celle dureté implique pour touts les protagonistes. C’est donc le spectateur qui devra tirer ses propres conclusions en se projetant à la place des personnages : qu’aurais-je fait en tant qu’accusé, en tant que victime ? En tant que père, en tant que mère ?
C’est un film fort qui rappelle le très bon La Fille au Bracelet de Stéphane Demoustier sorti l’an passé, parce que comme lui, Les Choses Humaines montre les différentes étapes du système judiciaire, de l’arrestation au dénouement du procès (avec des flashbacks sur les faits). On notera tout de même une bonne heure de procès !
J’avoue ne pas connaître le travail d’Yvan Attal en tant que réalisateur, mais je dois dire que Les Choses Humaines est une bonne entrée en matière. Au départ sceptique sur l’utilisation outrancière de la caméra à l’épaule qui implique des plans en perpétuel mouvement, j’ai vite compris qu’il s’agissait d’une intention artistique. Au départ, le réalisateur nous présente les personnages de la famille Farel avec une caméra en mouvement comme pour souligner que la vie de Jean, Alexandre et Claire va à 300 à l’heure. Puis l’affaire démarre et la caméra se fixe progressivement pour insister sur la rigidité et la rigueur du système judiciaire Français. Autre point intéressant alors qu’on voit venir le plan final à des kilomètres, Yvan Attal choisit d’aller un peu plus loin pour laisser se terminer le film sur un plan crucial : le visage de la victime. Sinon, la musique est globalement absente (ou tellement discrète qu’elle ne se remarque pas), ce qui renforce le côté réaliste et abrupt du film.
Énorme point fort, la direction d’acteur d’Yvan Attal est visiblement rondement bien menée. Et quels acteurs ! Pierre Arditi toujours impeccable qui vole littéralement l’écran à chaque apparition, Mathieu Kassovitz très bon également, Charlotte Gainsbourg et Audrey Dana pleines de subtilité et de douceur ou encore Benjamin Laverne et Judith Chemla en avocats impressionnants pendant les plaidoyers. Pour Ben Attal (que je découvrais), je l’ai trouvé bien plus dans son rôle en 2ème partie de film qu’au départ, le rôle n’étant tout de même pas évident du tout. En revanche la jeune et nouvelle Suzanne Jouannet malgré le rôle encore une fois difficile de victime, s’en sort à merveille. Je suis persuadé que nous la reverrons très bientôt et qu’elle aura droit à sa nomination en tant qu’espoir aux Césars prochains.
Vous aurez le plaisir de retrouver ce film en salles le 1er décembre, et je vous encourage à y aller, il ne vous laissera pas indifférent et aura le mérite de provoquer le débat.
CaptainSmoke lui attribue la note de
En bref
Les Choses Humaines est un très bon film, clivant, fort et bien interprété.