Le Jeu de la Dame (The Queen’s Gambit) est une série composée de 7 épisodes, de Scott Frank et Allan Scott, diffusée sur Netflix depuis le 23 octobre 2020. Il s’agit d’une adaptation du roman éponyme de Walter Tewis publié en 1983. Ce dernier devait être adapté sur grand écran par Heath Ledger il y a quelques années avec pour tête d’affiche Ellen Page. Le projet a été mis de coté suite au décès de l’acteur américain, qui devait, avec de film, faire ses premiers pas en tant que réalisateur. Scott Frank s’est associé à Allan Scott pour reprendre le projet et en faire une mini-série portée par Anya-Taylor Joy. Cette série a remporté un franc succès en cette fin d’année balayant toutes les autres sur son chemin. Un vrai succès dans les Echecs !
En pleine Guerre froide, le parcours de huit à vingt-deux ans d’une jeune orpheline prodige des échecs, Beth Harmon. Tout en luttant contre une addiction, elle va tout mettre en place pour devenir la plus grande joueuse d’échecs du monde.
Le féminisme sans les clichés
On ne peut pas parler de Le Jeu de la Dame sans parler du féminisme qui y est présent. Dès les premiers épisodes, on fait comprendre à la très jeune Elizabeth Hammon que les femmes n’ont pas leur place dans le monde des Echecs. Pour sa première inscription à un tournoi, elle n’est pas prise au sérieux. Sa première adversaire est une femme puis des hommes, qu’elle élimine un par un. Elle n’affrontera ensuite que des hommes jusqu’au Grand Maître Borgov, qu’elle vaincra à Moscou. La dernière scène résume l’esprit de cette série : une femme victorieuse adulée par une flopée d’hommes. Le mot de la fin « Let’s playing », indique que c’est la femme qui prend les rênes et qui décide. Elle a réussi à s’imposer dans un monde d’hommes.
Mais contrairement aux autres héroïnes féministes que l’on retrouve dans les films ou les séries, Beth Hammon ne hait pas les hommes. Enfant, c’est le vieux concierge de l’orphelinat qui va lui apprendre à jouer aux Échecs, plus tard, elle ne refusera jamais l’aide des hommes qui la considèrent tous comme une adversaire de taille, sans pour autant mettre en avant le fait qu’elle soit une femme. Les joueurs qu’elle bat s’inclinent (presque) tous avec fair-play et respect.
Beth Hammon est une femme et n’essaye pas de le cacher. Elle est toujours très élégante, bien coiffée et maquillée. Elle aime faire du shopping, s’amuser et suit la mode des années 60. Les tenues de Beth en disent d’ailleurs long sur son personnage : elle porte souvent des robes ou manteaux à carreaux, qui rappellent l’échiquier. Pour la dernière scène, elle porte un manteau blanc ainsi qu’un béret de la même couleur, une tenue qui fait écho à la Reine de ce jeu. Contrairement aux héroïnes des autres séries, elle ne cherche pas à se masculiniser pour réussir. Enfin, son statut de célibataire et de femme indépendante n’est pas pointé du doigt. Elle rencontre une ancienne élève de l’orphelinat, devenue à présent femme mariée et mère. Aucun jugement n’est donné, ce sont juste deux femmes qui ont pris deux chemins différents.
Autre point important : les femmes ne sont pas des victimes. C’est une vraie différence avec les autres séries mettant en scène des jeunes héroïnes (Sex Education, 13 Reasons Why…). Il n’y a pas d’agressions sexuelles ou de viols. Enfin, Jolene, l’amie de Beth qu’elle rencontre à l’orphelinat, a déjà conscience qu’en étant noire, elle aura des difficultés. À la différence des autres jeunes filles, elle ne sera pas adoptée, mais parviendra à s’en sortir grâce à ses études. Beth et Jolene sont deux femmes qui réussissent dans leur domaine grâce à deux choses : la persévérance et le travail. La progression de Beth se traduit également par l’esthétisme : l’orphelinat sombre laisse place aux hôtels et aux intérieurs lumineux.
Une diversité dans le scénario
Bien que cela soit le fil conducteur de la série, Le Jeu de la Dame ne s’intéresse pas qu’aux Echecs. La question de l’abandon revient de nombreuses fois : Beth est née d’une relation illégitime et se retrouve à l’orphelinat après le décès de sa mère dépressive, puis de nouveau seule après celui de sa mère adoptive. Cette solitude va avoir un impact sur la jeune femme. Elle va sombrer dans l’addiction aux médicaments dès son arrivée à l’orphelinat puis à l’alcool lorsqu’elle sera un peu plus âgée. Ces addictions vont faire sombrer la jeune femme car elles ne sont pas compatibles avec la rigueur requise par les tournois. Elle s’en sortira avec l’aide de ses amis qui veulent faire d’elle la meilleure joueuse du monde.
Le réalisme des parties
Pour ceux qui se posent la question, toutes les parties sont réellement jouées et même inspirées de parties qui ont existées. Les scénaristes se sont entourés d’experts pour construire les scènes. Anya-Taylor Joy, qui a avoué ne rien connaître à ce jeu avant d’incarner Beth Hammon, a dû en apprendre les mécaniques. Même si cela n’est pas très dérangeant, il est vrai que la gestuelle est plutôt digne d’un acteur que d’un joueur professionnel. On repère parfois des manques d’assurance dans la façon de bouger les pièces, ce qui est rarement le cas chez les plus grands joueurs.
Il n’est pas nécessaire de savoir jouer aux Echecs pour suivre et aimer la série, tous les mouvements sont compréhensibles, même pour les néophytes. Chaque partie est filmée différemment pour éviter une lassitude. Et cela fonctionne, notamment grâce à l’utilisation de l’écran partagé. On apprécie également la représentation de l’échiquier au plafond avec les pièces qui se déplacent selon l’imagination de Beth. Une superbe touche de fantastique.
PaulineG lui attribue la note de :
En bref
Pas de saison 2 prévue pour Le Jeu de la Dame qui est désormais la mini-série la plus vue de l’histoire de Netflix. Ce n’est absolument pas un regret. Cette série est captivante et montre l’ascension d’une petite fille qui doit faire face au système et à ses addictions.