[Critique film] – Les Raisins de la Colère

Tout juste un an après le succès du chef d’œuvre de John Steinbeck, Les Raisins de la Colère, John Ford choisit d’en réaliser une adaptation très fidèle. Une adaptation peut-être même trop fidèle dans le sens ou on a parfois l’impression légèrement gênante que les chapitres du roman sont repris exactement dans l’ordre et presque au détail près rendant l’ensemble un peu « rigide » quand on a lu le roman assez récemment (comme ce fut mon cas au moment du visionnage). Il est dommage qu’on ait parfois le sentiment que John Ford se contente de reprendre presque mot pour mot les dialogues du livre, sans en apporter de la substance ou un sens supplémentaire (même si il était évidemment primordial de conserver la portée originale du roman).

Les Raisins de la Colère

 

Toutefois, il n’en demeure pas moins que John Ford parvient à retranscrire toute la force de l’œuvre de Steinbeck. Comme dans le livre, nous ressentons parfaitement la souffrance, l’impuissance et la colère des migrants cherchant toujours à garder leur dignité malgré les humiliations qu’ils subissent. On perd certes en immersion dans l’ensemble car les descriptions pointilleuses de Steinbeck auraient difficilement pu être retranscrites à l’écran, mais l’émotion demeure présente, et c’est bien l’essentiel. On pense par exemple à la scène ou les enfants du camp mendient à manger devant la famille des Joad, et que le malaise s’empare de ces derniers, qui, pourtant affamés, avalent avec honte leur maigre pitance…
La notion de solidarité entre les migrants, très forte dans le roman, semble en revanche être un peu mise au second plan dans le film (mis à part lorsque la famille Joad parvient au camp du gouvernement), pour une raison qui m’échappe (insister sur l’isolement de la famille peut-être ?).

La réalisation dévoile également plusieurs plans de grande beauté, notamment ceux mettant en avant les terres sèches et désolées de l’Oklohama, contrastant avec les contrées plus verdoyantes de la Californie, cachant malheureusement une réalité bien moins enviable…

Les Raisins de la Colère

La famille Joad (du moins, ceux toujours en vie…) arrivant en Californie

Les Raisins de la Colère offre aussi la possibilité de découvrir l’un des premiers grands rôles de Henry Fonda, qui, 17 ans avant « Douze hommes en colère » (décidément, il faut croire que le Monsieur était souvent en rogne), tenait déjà un grand rôle à forte portée politique et sociale. Le célèbre discours de Tom Joad à sa mère à la fin du film est notamment saisissant, prenant une intensité particulière. Tous les acteurs principaux demeurent particulièrement touchants, respectant avec une certaine authenticité la description de leurs personnages dans le livre de Steinbeck.

Les Raisins de la Colère

Un repas de la famille Joad

En résumé, le film de John Ford est une très bonne alternative au livre pour ceux qui n’auraient pas le courage de se lancer dans l’œuvre originale. La lecture demeure tout de même plus bouleversante, le récit étant notamment plus âpre encore sous la plume de Steinbeck. Par exemple, les dernières pages du roman, particulièrement dures, ont été retirées du film, il faut dire qu’en 1940 montrer cela au cinéma aurait sans doute beaucoup choqué… en attendant, le fait que le personnage de Rosasharn soit enceinte dans le film n’est du coup pas très utile, vu que l’impasse a été faite sur l’accouchement (vous avez sans doute deviné comment celui-ci se termine dans le livre…).

Slowvlaki lui attribue la note de
8/10

En bref

Un grand classique à voir et à revoir.

Slowvlaki

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